Ingrid Nováková, spécialiste international, 22 mai 2025
L’actuel Yémen fut, dès le IIe millénaire av. J.-C., le cœur des civilisations sud-arabiques. Les tribus sabéennes, minéennes et qatabanéennes exploitaient la résine d’oliban et la myrrhe, acheminées par caravanes jusqu’à Pétra et Alexandrie. Le royaume de Saba fut l’un des plus puissants. Il se développa autour de la ville de Ma’rib, où un grand barrage permit d’irriguer les terres agricoles dans une région désertique. Après Saba, d’autres royaumes comme Qataban, Hadramaout et Himyar prirent le relais. Le royaume himyarite, vers le IIe siècle, unifia une grande partie du territoire. À cette époque, plusieurs religions coexistaient : des cultes polythéistes, le judaïsme (surtout sous le roi Dhu Nuwas) et le christianisme venu d’Éthiopie. En 570, la Perse envoya une armée pour contrôler la région.
L’islam arriva au Yémen vers l’an 628. Le prophète Mahomet envoya des messagers dans la région, et de nombreuses tribus yéménites se convertirent. Le Yémen devint alors une province des grands empires musulmans, d’abord les Omeyyades, puis les Abbassides. En 897, l’imam Yahya ibn al-Husayn, un érudit chiite zaydite originaire du Hedjaz, fonda dans le nord un État théocratique où l’autorité religieuse et politique était exercée par un imam issu de la descendance d’Ali. À partir du XVIe siècle, les Ottomans tentèrent de prendre le contrôle du nord du pays, mais rencontrèrent une forte résistance. Leur domination fut interrompue, puis rétablie au XIXe siècle. Ils gouvernèrent alors depuis la ville de Sana’a. Pendant ce temps, les Britanniques prirent le contrôle du port d’Aden en 1839. Le Yémen se retrouva ainsi divisé entre une partie nord sous domination ottomane et une partie sud sous domination britannique.
En 1962, une révolution mit fin à la monarchie religieuse du nord et établit une république. Cinq ans plus tard, en 1967, le sud obtint son indépendance à son tour et devint un État marxiste, allié de l’Union soviétique. Le 22 mai 1990, ils s’unifièrent pour former la République du Yémen, mais les divisions internes restèrent fortes. Une guerre éclata en 1994 entre les anciennes factions nordistes et sudistes, que le pouvoir central dominé par le Nord remporta. Dans les années 2000, un groupe armé chiite, les Houthis, originaire du nord, se souleva contre le gouvernement. En 2014, les Houthis prirent le contrôle de la capitale, Sanaa. En 2015, une coalition dirigée par l’Arabie saoudite intervint militairement contre eux, tandis que l’Iran appuyait les Houthis. Le pays sombra dans une guerre dévastatrice, provoquant des centaines de milliers de morts et une crise humanitaire parmi les plus graves du XXIe siècle.